« Arrivederci amore ciao » : de Che Guevara à Rome
On pensait aller voir un "Romanzo criminale" bis on avait tout faux : c’est un drôle de film que "Arrivederci amore ciao"… qui débute comme un drame et finit presque comme une comédie bien que ça ne soit en rien une tragicomédie à l’Italienne. Chemin faisant, le film évolue, avec deux visions possibles : soit le réalisateur cherche son style et perd de vue son point de départ, soit, son projet de juxtaposer plusieurs styles dans le même film (correspondant aux périodes de la vie de son anti-héros) tout en conservant une unité de ton est très ambitieux. Et il faut dire que le cocktail ne marche pas si mal que ça Sauf qu’on est tout de même dubitatif de sortir de la salle sur des rires après tant de vice et de violence…
Giorgino, ancien terroriste communiste, condamné à la perpétuité, croupit en exil en Amérique du sud avec son copain Luca. Le fleuve somptueux, les crocodiles, les militaires, la cabane en bois sombre et humide, lancien militant n’en peut plus, il veut rentrer au pays à n’importe quel prix… Pour cela, une seule solution : tuer son meilleur ami en échange d’un faux passeport… Après que Luca ait fini de le raser et tandis que la radio diffuse une vieille chanson "Arrivederci amore ciao", il lui tire dans le dos et entame une carrière d’ordure professionnelle… Avec ce faux passeport français, Giorgino débarque à Paris et s’empresse de faire chanter un écrivain célèbre, un ancien acolyte ex-terroriste lui aussi. A Rome, un flic ripou lui met le marché en main :sil balance une liste de noms de la bande, on refait son procès en le déclarant non coupable… Au bout de 5 ans d’une vie rangée, Giorgino pourra demander sa réhabilitation… Pendant qu’il marche dans les couloirs de la prison, une voix off lit la liste des dénoncés qui s’affiche sur l’écran comme un listing…
Tombant par hasard sur une vieille connaissance, Pasquale dit "Le Vésuvien", un truand proptiétaire d’un club d’orgies, le "Blue sky", Giorgino accepte d’en être le manager… Devenu millionnaire après un parcours du crime sanguinaire, l’impitoyable Giorgio, passé du combat révolutionnaire à la corruption et au crime organisé, dans les basques du flic ripoux, s’achète un restaurant, une respectabilité et une fiancée nunuche pour étayer son dossier de réhabilitation. Côté cur deux femmes séduiront l’ex-terroriste et futur notable : Flora, la blonde incendiaire qu’il force à coucher avec lui en échange de l’aménagement des dettes de son mari, cocaïnomane et amateur de prostituées, client régulier du "Blue sky" et Roberta, la brune romantique, l’oie blanche bornée et suspicieuse, qu’il lui faut épouser pour devenir respectable…
La bande-son du film est (un peu trop) prédominante avec des musiques rock années 70 comme"Smoke on the water" de Deep Purple (on M), des percussions, un leit-motiv de musique orientale pour la nostalgie et "La Notte" d’Adamo en intégrale… plus les deux versions d’"Arrivederci amore ciao", chanson originale composée pour le film, genre Dalida première période. Le son à fond la caisse et la caméra fébrile donnent, au milieu du film, un effet «film d’action us» mais ça ne dure pas… Aux images crépusculaires dans les verts et gris, qui composent la majeure partie du film, se superpose la saturation en rouge des scènes de débauche et le sang des victimes, des couleurs assez nauséeuses d’inspiration Mario Bava, maître Italien de l’horreur, qui vous mettent illico mal à l’aise…
Beaucoup de mouvements de caméra dans ce film atypique, beaucoup de plans filmés de haut ou de bas en haut, des plans panoramiques, des images qui se renversent, des corps tronqués passant sur l’écran et pour toutes le scènes (nombreuses) dans le club, des gros plans des parties du corps, soient les "marchandises" : les fesses, les mains, les billets de banque, les maquillages ripolinisés, les cuissardes noires des strip-teaseuses…
Pour étayer cette observation générale de la juxtaposition des styles, le réalisateur ne filmera pas de la même façon les scènes dans le club "Blue sky" et les scènes daction pour finir sur le mode, vaguement grotesque, de la dérision avec des visages déformés par la stupidité ou l’étonnement, d’étranges gros plans sur le visage de la fiancée de Giorgino balayé par ses cheveux (visage comme sorti du cadre de l’histoire), le quart d’heure final du film réussisant le tour de force de filmer un assassinat plein d’humour et la salle (dont votre rédacteur), devenue aussi impitoyable que Giorgino, rit un peu, beaucoup…
Pas tout à fait la fin cependant puisque un système de flash-back en double, utilisé maintenant quasi systématiquement au cinéma, nous ramène le premier plan du film en bis à la fin avec le même flash-back que celui du début allongé dune partie explicative : un homme chez lui dans la pénombre, tandis que gronde l’orage, se souvient de l’Amérique de Che Guevara et, plus loin, des attentats de sa jeunesse avec le compagnon Luca quand il n’était pas encore une ordure mais seulement un terroriste qui ne nourrissait "de livres, de joints et de révolution"…
La filmographie du réalisateur Michele Soavi, également acteur comme Michele Placido (acteur dans son film et réalisateur du fameux "Romanzo criminale") se compose essentiellement de films dépouvante : «Bloody birdy» (1986), «Sanctuaire» (1988), «Dellamorte dellamore» (1994) et de la réalisation en second équipe de « Les Frères Grimm » de Terry Gilliam. Présenté au Festival du film policier de Cognac, « Arrivederci amore ciao » est une oeuvre atypique et cynique, stylisée et dérangeante, entre rock et baroque, où le mal triomphe du bien…
Mini-Pitch : comment un ex-terroriste, nourri au Marxisme et à la lutte armée, condamné à mort dans son pays et exilé en Amérique du sud, revient à Rome pour devenir une ordure respectable…
MMDA : Ils auraient dû donner le rôle à Materrazzi…
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