Cannes 2007/UN CERTAIN REGARD/ + « Naissance des pieuvres » + « Le Voyage du ballon rouge » + « Mon frère est fils unique »
"NAISSANCE DES PIEUVRES"*** de Céline Sciamma (France)
La réalisatrice du film est venue répondre à quelques questions après la projection en compagnie de deux de ses actrices. Céline Sciamma a la baraka : son film, cétait son scénario de fin détudes de la Fémis. Ensuite, quand elle a décidé de le tourner (elle na jamais réalisé aucun film auparavant, même pas un court métrage), elle a obtenu facilement tous les financements, lavance sur recettes, Canal, Arte, etc
Ne restait quà trouver ses trois actrices, le plus difficile, trois mois de casting. Pauline Acquart (Marie) a été repérée au jardin du Luxembourg à Paris, cest son premier rôle au cinéma, Adèle Haenel (Florianne) connaissait déjà la directrice du casting pour un précédent rôle. Le récit qui se passe dans le milieu de la natation synchronisée, sport exclusivement féminin, est dinspiration autobiographique. Quand on lui demande pourquoi labsence des adultes dans le film, elle répond que cest un choix, et pourquoi aussi labsence des relations des filles avec des garçons, elle répond quelle ne voulait pas traiter ce sujet par dessus la jambe en trois scènes, elle a tout recentré sur son histoire et cest vrai quon remarque ce vide qui se resserre autour des trois héroïnes : pour la première moitié du film, il existe encore des personnages de second plan, des copines et collègues de natation qui pépient dans les vestiaires, des garçons sous la douche, une soirée, une boite de nuit, pour la seconde partie du film, il ne reste plus personne que les trois filles et les apparitions du beau mec stupide quasiment muet, sujet de toutes les convoitises.
Marie, embryon de femme, est fascinée par la natation synchronisée à moins quelle ne soit hypnotisée par sa reine, Florianne, somptueuse créature blonde, qui est le chef du groupe des nageuses, archétype de la séductrice désirée des garçons et détestée des filles. Anne, la meilleure amie de Marie ne la fait pas rêver , elle correspond plutôt à larchétype de la grosse mal dans sa peau. Petit à petit, délaissant Anne et leurs jeux innocents, Marie va simmiscer dans lintimité de Floriane, la vamp, qui navait pas lhabitude des amitiés au féminin. Rétive et arrogante par principe, Florianne, rodée aux rapports de force, teste Marie et finit par céder à son amitié inconditionnelle, redevenant ce quelle est : une fille fragile et déprimée que son physique a condamné aux emplois de garce. Les rôles sinversent et de demandeuse, quémandeuse, Marie va devenir demandée, désirée, réveillant des pulsions homosexuelles ignorées chez Florianne. Cependant, Florianne na pas renoncé à répondre aux avances du beau François quAnne, malgré son physique ingrat, a décidé de séduire par tous les moyens. Le film, aux images couleur de cabine dUV, blanches et mauves, est un aquarium aux parois livides où se débattent les trois filles, où tous les coups sont permis pour déchiffrer sa sexualité dans le miroir de lautre devenu objet du désir.
Quand on a demandé à la réalisatrice pourquoi les pieuvres, elle a répondu que ça correspondait "au monstre qui grandit dans nos ventres quand on est amoureux et jaloux", que dans la natation synchronisée, il y a aussi la surface et la face souterraine, ce côté sophistiqué et brillant quon voit à la surface de leau et la partie immergée sombre, les jambes qui sagitent sous leau (quelle filme très bien, les nageuses exhibent à la surface soit leur visage et leurs bras, soit leurs jambes, la tête en bas dans leau). Elle a appris ensuite que la pieuvre possède trois curs
Les actrices : l’une ressemble un peu à Charlotte Gainsbourg à ses débuts dans "L’Accompagnatrice" (Pauline Acquart/Marie), l’autre à une Julie Delpy devenue sex-symbol (Adèle Haenel/Florianne), une bombe platine! (ca m’étonnerait qu’elle ne soit pas happée à l’avenir par des réalisateurs…)
Un début encourageant pour Céline Sciamma avec ce film excessivement focalisé, voire refermé sur son sujet et ses héroïnes, aux dépends de leur insertion dans la vie quotidienne et de leur environnement (lentourage, les lieux, le collège, la famille et les appartenances sociales sont totalement zappés), les trois actrices flottant à la surface du film comme des nageuses qui ne sortiraient jamais de leau
"Mon Frère est fils unique"**** ("Mio fratello è figlio unico") de Daniele Luchetti (Italie)
/Sortie le 12 septembre 2007
Dans lItalie des années 60 et 70, deux frères qui saffrontent depuis lenfance vont emprunter des trajectoires politiques antagonistes tout en poursuivant cette confrontation sans fin faites de conflits et de réconciliations.
Dans la famille Benassi , le frère cadet surnommé la Teigne, Accio, est le plus mal aimé et le leur rend bien. Trimballant sa hargne et sa colère du séminaire au parti fasciste où il sinscrit pour emboîter le pas de son père de substitution, bavard vendeur de nappes au marché, Accio, colérique et bagarreur soppose à son frère, le beau est séduisant Manrico, inscrit, lui, au parti communiste. Lirruption de Francesca, petite amie de Manrico dont les deux frères sont amoureux, va les souder imperceptiblement au delà de leurs divisions
Portrait de lItalie ouvrière provinciale où les parents Benassi sont logés dans des maisonnettes délabrées par lusine qui leur promet un relogement fantôme, où certains sont encore nostalgiques de lItalie fasciste du Duce, où dautres sapprêtent à faire la révolution, le beau ténébreux Manrico ayant le profil des recrues des futures Brigades rouges, le réalisateur décrit une poudrière prête à exploser.
Agréable surprise qui nen pas vraiment une dans cette sélection Un Certain regard, le réalisateur Danielle Luchetti nétant pas un novice, le film présente tout ce que le cinéma italien possède, entre autres choses, qui manque cruellement au cinéma français : mettre une histoire individuelle en perspective de lHistoire (et pas seulement le cinéma italien, il semble que lexception française est emmurée depuis la Nouvelle vague dans un sempiternel cinéma intimiste, en témoignent les films français de la sélection « Actrices » et « Naissance des pieuvres », pourtant parmi les meilleurs, films fermés et questionnants pavés détats dâme et de recherche du pourquoi du comment). Accio et Manrico, les deux frères ennemis, sont terriblement vivants, sensuels et charismatiques, la famille est à hurler de vérité, lhumour omniprésent malgré les drames, le récit vif et ryhtmé, que demander de plus
"LE VOYAGE DU BALLON ROUGE"** de Hou Hsia Hsien (Taïwan/France)
M’étant personnellement considérablement ennuyée (je sais que c’est subjectif) pendant ce film tourné à Paris rive gauche, quartier qui semble fasciner le réalisateur asiatique (les bus, le métro aérien, les appartements miniscules et bondés de la rue Mouffetard, les relations amicales et sans-gêne entre voisins), les interminables scènes en temps réel et le jeu des acteurs dont on a l’impression qu’il improvisent… lentement… avec Juliette Binoche (blond platine avec teintures de cheveux plus ou moins réussies), en roue libre dans l’emploi d’une femme débordée et surexcitée, incapable de mener de front vie professionnelle et vie privée, Hippolyte Girardot plus convaincant mais peu présent, sans parler de la fin du film sans cesse différée (une fin aurait été bienvenue quand la baby-sitter passe son film du petit garçon et y voit la présence du ballon rouge sur l’écran de la télé), dont on peut espérer dix fois que le générique va enfin s’afficher… Bien qu’on retrouve les lumière jaunies, rougies, des intérieurs (belles images de l’appartement rougi avec la cuisine bleutée en arrière plan), grande déception s’agissant de HSS…
Bref, je laisse la parole au blog Lanterna Magica qui a davantage apprécié le film que le blog CinéManiaC…
ET AUSSI : l’interview de Hou Hsiao Hsien réalisée par le blog LanternaMagica en 2006 qui donne un éclairage très intéressant sur l’évolution de l’oeuvre du réalisateur : extrait : "… Je crois que mon cinéma, esthétiquement, est déjà arrivé à maturité. Jaimerais donc faire des choses un peu expérimentales. Jaimerais aussi faire un film simple mais avec plein dénergie à lintérieur. Pour moi, le plus important pour faire un film, ce sont les acteurs et les lieux de tournage car chaque lieu de tournage montre lambiance de la vie quotidienne… … Sinon, jaimerais aussi parler dun film français, «Le Ballon Rouge» . Dans ce film, il ne se passe finalement rien mais le réalisateur à réussi à tout montrer de la vie à cette époque là. Ca mintéresse beaucoup… lire la suite…
Liste des critiques de films Un Certain regard Cannes 2007 sur le blog :
Actrices (France)
L’Avocat du diable (France)
El Bano del papa (Uruguay)
California dreamin’ (Roumanie)
(Et Puis les touristes) (Allemagne)
Magnus (Estonie)
Mon frère est fils unique (Italie)
Naissances des pieuvres (France)
Pleasure factory (Thailande)
La Visite de la fanfare (Israël)
Le Voyage du ballon rouge (Taïwan)
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