Faye : derrière la star

Pitch

Documentaire-entretien de Faye Dunaway, star des années 60/70. De son enfance à aujourd’hui.

Notes

Derrière Faye Dunaway, il y a sa mère : une femme forte et déterminée qui la forme au dépassement de soi. Enfant, Faye sait déjà qu’elle fera du théâtre et c’est sur les planches de Broadway qu’elle démarre. Les rencontres, les performances théâtrales remarquées, finiront par l’emmener à Hollywood où elle explosera avec Bonnie and Clyde d’Arthur Penn (1968), film signant le virage des productions classiques d’un Hollywood à bout de souffle et l’émergence du Nouvel Hollywood, pour lequel le réalisateur ne voulait qu’elle. Sa photo la plus célèbre (affiche du doc) a été prise le lendemain de son Oscar pour Network de Sydney Lumet (1976) où elle pose, lascive, au bord de la piscine du Beverly Hills hotel à LA ; déjà elle a créé son personnage. Tout au long du doc, elle dira que Faye Dunaway était un personnage qu’elle a créé mais que la petite fille (Dorothy) en elle existera toujours. Un peu comme Marilyn qui avait créé un double qui la dévorera.

Ce documentaire de Faye intime a une mise en scène minimaliste, la Faye Dunaway, 82 ans, cheveux longs platine, filasses, liftée comme toutes les actrices américaines, parle face caméra et se souvient, de nombreux extraits de films à l’appui. Le contraste entre l’actrice iconique des années 60/70 est saisissant mais elle semble accepter son âge à moins qu’elle ne donne le change. Une fois de plus. 

Quelques proches (dont Sharon Stone, devenue son amie), témoignent de son exigence sur les plateaux, où elle avait la réputation d’être une actrice «difficile», «ingérable», de son perfectionniste à offrir la meilleure prestation possible. Aujourd’hui, elle explique que cette agressivité relevait d’une bipolarité diagnostiquée et soignée tardivement, l’alternance de phases maniaques et de périodes dépressives*. Pudique, elle évoque son alcoolisme, ses cures de rehab, sa liaison avec Jerry Schwartzberg qu’elle quittera pour Marcello Mastroianni, «l’amour de sa vie» (elle le rencontre en Italie en 1968 pour le film Le Temps des amants de Vittoria de Sica; Mastroianni marié, le divorce interdit en Italie, Faye finira par le quitter) ; JS avec qui elle tournera néanmoins ensuite le génial Portrait d’une enfant déchue (1970) (Puzzle of a downfall child, inspiré de la vie du top model Anne-Marie Saint).

*La bipolarité était autrefois appelée psychose maniaco-dépressive.

Ce parcours d’exception d’une actrice d’exception, où Faye Dunaway enchaîne les rôles (L’Affaire Thomas Crown, 1968, avec Steve Mc Queen, L’Arrangement de Kazan, 1969, Little big man d’Arthur Penn, 1970, Chinatown de Polanski, 1974, etc.), est stoppé par un choix incompris du public quand elle accepte de tourner Mommie dearest (1981) d’après la biographie d’une des deux filles adoptées par Joan Crawford qui raconte les crises de démence et les maltraitance infligées par leur mère. Comme d’habitude, Faye Dunaway s’investit dans le rôle et devient le sosie de Joan Crawford. Mais le public prend le film au premier degré, heurté par la violence du harcèlement et des coups d’une mère névrosée, que tout dérange, sur ses enfants ; elle convient aujourd’hui que ce film marque le début de sa chute. Elle renouera avec le succès avec Barfly de Barbet Schroeder (1987) sazavec Mickey Rourke, d’après un roman de Charles Bukowski, lui-même en proie à un alcoolisme chronique.

Au détour d’une phrase, Faye parle de ses maris qui n’ont, visiblement, fait que passer, c’est en tout cas l’impression qu’a le spectateur, et ne  s’écroule, qu’une fois, pleure : quand elle avoue sa culpabilité d’avoir fait passer son métier avant son désir d’avoir un enfant biologique… Aujourd’hui, elle semble en paix, Liam, son fils, qu’elle adopté, son petit-fils, sont son bonheur tardif.

Au final, ce qui fascine dans ce documentaire à la mise en scène squelettique, c’est le personnage de Faye Dunaway à l’écran comme à la ville. A 82 ans, elle confesse beaucoup de choses qu’elle a tues jusqu’alors. Les images des extraits de films rappellent combien elle s’est toujours imposée en star à la force d’un travail acharné alors que certains ne la trouvaient pas assez belle pour faire du cinéma ou trop belle pour jouer Bonnie… La confession d’aujourd’hui est-elle une ultime mise en scène de celle qui a toujours su plonger dans ses névroses pour nourrir ses rôles?

Ce documentaire entretien fut présenté à Cannes cette année (un autre doc est consacré à Liz Taylor, la star ultime, et combien je l’attends…)

Pour le moment on peut voir Faye sur HBO/MAX. Peut-être que le prochain Festival américain se Deauville le mettra au programme de son 50ème anniversaire (6/15 septembre 2024).

Et aussi

Faye, en SO au festival de Cannes 2024, dans la section Cannes Classics, ne sortira pas en salles pour le moment. On peut le voir sur MAX depuis mi-juillet.

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