« An Education » (« Une Education ») : l’amant du Londres des sixties
Pitch
Au début des années 60, dans une banlieue bourgeoise de Londres, une écolière de 16 ans est initiée aux plaisirs de l'âge adulte par un trentenaire ambigu, trop charmeur pour être honnête...
Vu de Twickenham en 1961, banlieue middle class, le centre de Londres, ses loisirs et son agitation, c’est un peu l’étranger… Les parents de Jenny, génération issue de la guerre, habituée aux restrictions, goûtent désormais du confort matériel de leur pavillon avec une idée fixe, que leur fille réussisse dans la vie. Pour cela, le père a mis le paquet, dans le pensionnat de Jenny, cours de couture, de dessin, de cuisine, et aussi leçons de musique. C’est son violoncelle que Jenny transporte sous une pluie battante qui lui donne l’occasion de rencontrer David, trentenaire charmant, charmeur, roulant dans une voiture de sport bordeaux.
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photo Metropolitan
Démarre la ronde des plaisirs de l’âge adulte. Etrangement, les parents de Jenny vont se laisser totalement embobiner par David qui leur raconte des salades pour la sortir le soir, l’emmener en WE… Avec David et un couple d’amis du même genre, Danny et Helen, Jenny va passer de l’écolière en uniforme à un clone d’Audrey Hepburn en robe et sac à main en vernis, chignon et make-up sophistiqué. Les virées dans les clubs, les week-ends à Oxford, à Paris, rien n’arrête la prodigalité de David qui semble très amoureux de Jenny. Pourtant un conflit souterrain taraude Jenny, ado intellectuelle et cultivée, qui briguait avant David son inscription en littérature à Oxford : la vie ou les études, le mariage ou la culture… Pourtant, quelques signes auraient pu alerter Jenny de la vraie profession de David qui prétend faire des affaires avec Danny.
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Le film est plus pervers qu’il n’en a l’air. D’abord, la manière dont David traite les parents de Jenny est choquante, le père est présenté comme un plouc complexé et crédule que le désir de promotion sociale pour sa fille a privé de tout jugement, la mère, comme une futile qui s’ennuyait en ménage. Ensuite, l’attraction de Jenny pour David cache son attirance pour une entité, le trio David, Helen, Danny, et surtout ce qu’ils représentent de luxe, de liberté, de saut dans un âge adulte VIP, l’appartement de Danny et ses tableaux de maître, la garde-robe de top-model d’Helen, les tables réservées dans les restaurants chics.
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Quand l’actrice principale a raconté à ses amies qu’elle allait tourner un film sur les années 60, elle déclencha l’enthousiasme, le Swinging London, les années magiques… Mais le récit, inspiré d’un article autobiographique d’une journaliste anglaise, a lieu au tout début des années 60 à Londres, et il se passait quoi? Rien ou pas grand chose… Les moeurs étaient aussi coincés que dans les années 50 mais ce fut tout de même l’antichambre du flower power…Peter Sarsgaard (David) campe un séducteur trop doux, vraiment charmeur, ça marche, pour Carrey Mulligan, l’actrice de 22 ans interprétant une Jenny de 16/17 ans, ce n’est pas tant l’âge que l’interprétation qui est limite : maniérée, des jeux de regards à n’en plus finir, un manque de spontanéité. La transition écolière/fausse jeune femme passe mais on n’est pas très sensible à cette histoire trop caricaturée où personne ne semble souffrir vraiment ni trouver rien d’étonnant à rien, le flegme britannique sans doute… Sympa, la reconstitution minutieuse de l’époque avec les cigarettes anglaises sans filtre (Bachelor) ou les cigarettes russes multicolores à filtre doré, les robes cintrées et petits manteaux courts (qu’on reporte aujourd’hui), l’évocation des Teddy boys, les chansons de Juliette Gréco et le chic (bien passé de mode…) de parler français en Angleterre. A noter l’irruption d’Emma Thompson toujours meilleure que tout le monde dans un petit rôle de directrice d »école.
PS. Le scénario du film, écrit par Nick Hornby, tiré d’un essai autobiographique de Lynn Barber, vient de paraître en librairie le 4 février 2010 (éditions 10/18).
Notre note
(3 / 5)
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