« Conviction » : la promesse
Pitch
Pour sauver son frère, condamné à perpétuité pour meurtre, une femme divorcée, sans ressources ni instruction, persuadée de son innocence, devient avocate afin de faire réviser son dossier...
Ca démarre dans le Massachussets en 1980 par la scène du crime, une caravane verdâtre posée sur un terrain vague, du sang sur les murs partout dans, la cuisine crade, le salon, la chambre, un cadavre au pied du lit, celui de Katarina Brow, serveuse dans un restaurant, une arrestation : Kenny Waters (Sam Rockwell), qu’on relâche aussitôt. Deux ans plus tard, la police arrête à nouveau Kenny pour meurtre, ils ont trouvé des preuves accablantes qui l’accusent d’avoir volé et poignardé Katarina Brow de plus de trente coups de couteau. Kenny est jugé, condamné à la prison à perpétuité. La police, en vérité Nancy Taylor, une femme policier d’un certain âge, semble s’être acharnée sur cette affaire, menant l’enquête deux années durant.
—–
photo Fox
12 ans plus tard, Betty Ann Waters (Hilary Swank), mariée, deux enfants, s’est inscrite à un cours de droit, avec une certaine Abra Rice, qui deviendra son amie, elles sont les deux « vieilles » de l’université. Obsédée par le projet de faire sortir son frère Kenny de prison, Betty Ann sacrifie sa vie, son mariage, divorce, ses enfants préférant vivre avec leur père. Cette femme, sans instruction en 1980, mettra 18 ans à faire rejuger son frère, entre temps, elle est devenue avocate afin d’assurer la défense de son frère, et a examiné dans les moindres détails les témoignages et analyses de sang qui ont conduit Kenny derrière les barreaux. C’est une histoire vraie dont est tiré ce film (on voit la photo des vrais protagonistes de l’affaire à la dernière image du film).
photo Fox
Le film brosse trois époques avec des aller et retours, 1980, l’époque du crime, les 20 années suivantes, le combat acharné de Betty Ann pour étudier malgré ses lacunes en culture générale, faire partie de ceux qui ont le pouvoir d’être du côté de la loi, se raprocher du cabinet du « projet innocence » spécialisé dans les procès de victimes d’erreurs judiciaires. Enfin, troisième période, en flash-back, la plus émouvante, celle qui explique la suite, l’enfance de Kenny et Betty Ann, celle qu’il appelle encore dans sa prison « my baby sister », leur mère débordée par 9 enfants de 7 pères différents les ayant placé dans multe familles d’accueil, séparés, faisant d’eux deux inséparables à la vie à la mort.Ce qui est très bien fait dans ce film, construit comme un thriller judiciaire, c’est la suspicion en filigrane, l’installation du doute permanent de la culpabilité ou non de Kenny en semant des éléments contradictoires par ci par là tandis que sa soeur croit de manière fanatique à son innocence, plus que lui-même dont on ne sait pas si certaines de ses réactions négatives sont imputables à la dépression en prison ou à un simili-aveu qu’elle ne veut pas entendre. Jusqu’au bout, on est dubitatif, ce qui est assez captivant. Il y a un ton, une atmosphère de la dureté de l’Amérique profonde dans ce film, une fausse bonne ambiance provinciale où tout le monde se connaît, où l’on fait la fête dans un pub les samedis soirs avec l’angoisse en filigrane d’un possible drame, Kenny, violent, se bagarrant, Kenny, charmeur, faisant un numéro de strip-tease improvisé, les femmes de Kenny vulgaires et agressives.
photo Fox
Ce ton réaliste en sourdine est beaucoup plus présent dans la première partie du film que dans la seconde, plus classique, plus film lambda (genre Julia Roberts années 90) avec Hilary Swank/Betty Ann en femme 100% courageuse qui va réussir l’impossible, les scènes de la recherche de preuves innocentant son frère se succédant, l’amie fidèle, l’avocat dévoué, le frère vieillissant en prison, la fille du frère qui pardonne, on est passé de l’ambiguité d’une province confinée avec sa population souvent dans la précarité, décor hostile, lumière polaire, à un film nettement plus formaté aux dialogues plus articifiels et aux images plus banales.Pourtant l’ensemble se tient car le spectateur, malgré les lourdeurs de la seconde partie, s’est attaché aux personnages et à l’histoire, à cette histoire d’amour inconditionnel d’une soeur pour son frère, se comportant toute leur vie comme si ils étaient restés ces enfants malheureux seuls au monde, ne pouvant compter que l’un sur l’autre, et ça fonctionne. On note la présence de Juliette Lewis, une actrice qui se fait rare (elle préfère donner des concerts) dans un petit rôle étonnant de femme usée avant l’heure, édentée et alcoolique.
Notre note
(4 / 5)
Laisser un commentaire