« Histoire personnelle de la littérature française » : 80 portraits d’auteurs français de La Rochefoucauld à Simenon
Comme on a pu le remarquer à l’occasion, la rubrique « Exception livres » s’est un peu étoffée sur le blog, la littérature faisant partie depuis toujours de mes centres d’intérêt même si c’est nettement moins qu’autrefois… Aussi, ce coffret 100% littérature française me tentait aussi comme un moyen d’y retourner plus souvent…
Si l’on est un peu assommé d’avance en pesant ce coffret de 7 DVD, on est vite rassuré par la présentation : en 80 portraits de 13 minutes d’écrivains français majeurs, on balaye tout ce qu’on aimerait savoir au minimum… sur la littérature du millénaire précédent. Chaque DVD traitant d’une période clé, on a le choix entre tout regarder ou faire un choix par auteur, ce qui assez pratique pour un coffret que, pour ma part, j’imagine plus à consulter comme une sorte de dictionnaire de littérature qu’à regarder d’un trait. J’ai donc testé quelques entrées dans les auteurs les plus anciens, ceux que j’ai personnellement envie de découvrir au delà de leur nom…A l’origine, ces portraits d’écrivains furent diffusés à la télévision sur La Cinquième à la fin des années 90. La méthode est simple : un mini-entretien entre Olivier Barrot, journaliste, et Jean d’Ormesson qu’on redécouvre sachant un peu tout sur tout le monde, curieux, cultivé, féru de vraie littérature, incollable sur la généalogie et l’histoire de France, s’amusant du récit des liaisons amoureuses multiples et croisées des siècles précédents… loin de son image de séducteur vintage chic qu’on connaît aujourd’hui traînant chez Ruquier ou autre plateau TV à se raconter. Suite à ces émissions, Jean d’Ormesson écrira « Une autre histoire de la littérature française », un best-seller (existe en Folio).
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Au passage, d’Ormesson fait remarquer que ce qui est ennuyeux dans la profusion de livres qui sortent chaque année, c’est qu’ils nous privent de lire les anciens… Et nous donne une furieuse envie de lire… Petit bémol, la large part accordée aux XX° siècle qui occupe 3 DVD de la collection! On se serait passé, par exemple, de Roger Martin du Gard ou François Mauriac… quand le XVII° est un peu court (tant qu’à parler de Bossuet, on aurait pu aussi évoquer Fénelon et pourquoi pas l’oublié Bourdaloue!). Manque surtout Huysmans (« A Rebours »), représentant majeur de la littérature décadente de la fin du XIX°…
DVD1 des chansons de geste à La FontainePas le plus facile et couvrant une très large période, on y trouve aussi bien François Villon que Rabelais ou Descartes, Pascal. Mais on y découvre aussi La Bruyère et ses « Caractères », qualifié de premier intellectuel, le duc de Rochefoucauld, grand seigneur connu aujourd’hui pour ses maximes pessimistes, le cardinal de Retz, archevêque et libertin intempestif ayant mis toutes les femmes de Paris dans son lit…
DVD2 de Molière à Mme de Staël
Surtout le XVII° siècle avec les deux amies qu’étaient Mme de Sévigné et Mme de Lafayette, la première laisse surtout sa correspondance avec sa fille Mme de Grignan (1000 lettres), la seconde écrit sans le savoir le premier roman psychologique « La Princesse de Clèves », éloge du renoncement. Bossuet, religieux connu aujourd’hui plus pour son nom que pour ses « Oraisons funèbres » qu’on se garderait bien de lire… intelligence prodigieuse en quête de vérité, écrivain célébré par Paul Valéry, Bossuet annoncerait Montesquieu. Le couple Mme de Staël (qualifiée d’emmerdeuse, entichée de Napoléon Bonaparte) et Benjamin Constant « trop intelligents pour être heureux », lui aussi écrit un roman psychologique indémodable « Adolphe ». Enfin, le cas Saint-Simon, aristo vaniteux préoccupé surtout de conserver les privilèges de la noblesse, ses « Mémoires » qu’il écrit passé la soixantaine vont paraître au XIX° siècle alors qu’il vécut au XVIII° et parlait du XVII° de Louis XIV…
DVD3 de Chateaubriand à Flaubert
Le XVIII° siècle et le début du XIX° avec Chateaubriand, Stendhal, les romantiques (Lamartine, Vigny, Musset) mais aussi Hugo, Balzac ou Flaubert. Henri Beyle dit Stendhal, méconnu de son vivant (il le pressentait), n’aimait que les actrices et les mathématiques… Adepte de la sécheresse du style, ses romans les plus connus ont pourtant sur le fond la même trame très romantique, « Le Rouge et le noir », « La Chartreuse de Parme », et, d’après d’Ormesson, le personnage Julien Sorel/Fabrice Del Dongo annoncerait « Théorème » de Pasolini… Charles Nodier, l’oublié, précurseur de la littérature fantastique, amateur de vampires. Gérard de Nerval, le romantique absolu, le seul qui se soit suicidé, féru de voyages, ami d’Alexandre Dumas, traducteur du « Faust » de Goethe, connu pour ses « Chimères, il va faire mieux que Nodier en annonçant les surréalistes dans « Les Filles du feu » » où il tricote un culte pour la femme aimée inspirée d’une chanteuse d’opéra qu’il a en fait peu connue (intrusion du songe dans la vie réelle). Enfin, le grand favori de Jean d’Ormesson : Chateaubriand (à cheval sur le XVIII° et le XIX° siècle) : d’Ormesson dit de lui qu’il est l’héritier de Rousseau, le père de Hugo, le grand père de Baudelaire et l’arrière-grand-père d’Aragon. La passion de Chateaubriand pour sa soeur Lucille lui inspire sans doute le thème des amours interdites. Un peu menteur en relatant son voyage en Amérique, par exemple, il rate sa vie mais en la racontant dans « Les Mémoires d »outre-tombe », il en fait le chef d’oeuvre absolu.
Léautaud, Jules Renard et jusqu’à André Gide.DVD5 de Proust à Cocteau
La fin du XIX° et le début du XX° siècle de Proust, Apollinaire … à René Char, Cendrars et Saint-John Perse en passant par Paul Morand et Paul Valéry.
DVD6 de Cocteau à TardieuLe XX° avec les auteurs les lus encore aujourd’hui (avec ceux du DVD5) : Cocteau, Drieu la Rochelle, Montherlant, Céline, Artaud, Genet, Marcel Aymé, Pagnol, Aragon , Prévert, Boris Vian mais aussi des auteurs récemment redécouverts comme Emmanuel Bove.
DVD7 de Yourcenar à Pérec
Notre note
(3,5 / 5)
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