« Mad men » saison 3 : on accélère, on délocalise, exit le rythme mélancolique…
le look des protagonistes d’une agence de pub à Manhattan dans les années 60 sur la très chic Madison avenue, est intacte.
les personnages : Don Drapper/Joan Holloway/Pete Campbell/Peggy Olson/Roger Sterling (photo Canal+)
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les personnages : Betty et Don Drapper (photo Canal+)
Allers et retours saccadés entre les lieux, situations silmultanées, sentimentalisation des liaisons Souvent plusieurs scènes se passent en même temps, la plupart hors de l’agence de pub ; exemple, on a en simultané pas moins de quatre lieux et situations : Joan et son mari médecin reçoivent des confrères, Roger Sterling et sa nouvelle épouse font une fête dans leur villa, quatres jeunes pubards passent le WE à l’agence de pub à se défoncer, le père de Betty s’occupe de sa petite-fille… Ces brusques allers et retours d’un lieu à un autre, à la recherche d’un rythme plus vif, sont assez secs, un peu lassants. Idem pour les réunions des chefs buvant un verre dans le bureau de Cooper à l’agence, toujours un peu la même scène répétitive…
En revanche, la mise en place des futures infidélités du couple Drapper est lente d’autant que cette-fois ci, l’adultère est symétrique : Betty, enceinte, jusqu’aux dents, rencontre Henry Francis, bras droit du gouverneur, pendant la soirée des Sterling… La future nouvelle maîtresse de Don sera une petite brune ni garce ni nympho, l’institutrice de sa fille, une histoire bien différente des précédentes liaisons de Don. Contrairement aux saisons précédentes où les adultères de Don semblaient gratuits, ses liaisons délétères, ici les histoires extra-conjugales versent dans le genre sentimental, Henry Francis est un type sérieux et responsable, l’institutrice une femme aimante et généreuse.
Fin des allusions, des sous-entendus, des ellipses et passage à l’acte : on montre les choses frontalement
L’homosexualité de Salvatore Romano, par exemple, qu’on évoquait, est ici clairement mise en scène : surpris embrassant le garçon d’étage à l’hôtel où il était descendu en voyage d’affaires à Baltimore avec Don Drapper. Cette narration allusive, elliptique, couplée à un rythme lent, presque immobile, hypnotique, ces souffrances souterraines qui affleurent et qu’on contrôle, ce style indéfinissable, très classe, qui a fait le succès de la saison 1 tellement différente des autres séries, n’existe plus.
Remplacement des fêlures souterraines des personnages par la vision de publicitaires de plus en plus déglingués, irruption de la violence, de la guerre du Vietnam
Outre la consommation d’alccol en inflation chez les dirigeants, on assiste à l’irruption de la drogue dans l’univers « Mad men », un dealer vient approvisionner en Marijuana le groupe des jeunes publicitaires enfermés dans l’agence pour travailler pendant le WE. L’incursion de la violence sous formes d’actes isolés : cette tondeuse électrique qui sectionne le pied du futur nouveau responsable anglais de l’agence, éclaboussant le mur de sang, exit le malheureux. Une scène réunit les trois nouveautés intégrées dans cette saison 3 en arrière-plan social et politique : la drogue, le Vietnam, la violence : Don, déprimé, ramasse la nuit deux auto-stoppeurs qui lui offrents des comprimés avec de l’alcool, il accepte, le couple va se marier aux Chutes du Niagara pour que le type échappe à l’enrôlement pour le Vietnam, défoncé, Don les suit dans leur chambre et se fait tabasser et voler. Progression de la télévision dans les foyers porteuse d’infos sur la violence : faits divers sanglants, assassinat de Kennedy et de son assassin présumé Lee Harvey Oswald.
le personnage : Joan Holloway
Disparition progressive du mystère Don Drapper, banalisation de la série
Le personnage de Drapper a évolué dans le sens qu’on montre clairement ses failles, ses démons, ses cauchemars issus du passé qu’il cache (dès la scène d’ouverture de l’épisode 1). Le mystère Don Drapper, l’homme qui a tout pour être heureux, celui que la réussite ne comble qu’en surface, dont les tendances auto-destructrices sont imperceptibles, s’est estompé peu à peu laissant la place à un homme franchement malheureux, alcoolique mondain, névrosé, à deux doigts de craquer.L’antichambre de la future saison 4 avec le salutaire virage des deux derniers épisodes
Hormis l’exceptionnelle reconstitution des années 60 (dont les robes vintage à tomber qui auraient inspiré nombre de stylistes contemporains), la série s’est banalisée, la faute surtout à la fin de l »unité de lieu, l’agence de pub, ou les hommes vivaient dans un univers clos, luxueux et parano, hors de la réalité (Mad men) ; la faute à l’intégration d’événéments choc pour donner du relief, à l’accélération du rythme en coupant les scènes, aux va et vients entre des situations simultanées. En deux mots, si la saison 3 a perdu le style si raffiné des débuts, elliptique, immobile, donnant la priorité à l’ambiance confinée de l’agence de pub, indolente et perverse, c’est surtout par crainte que le spectateur s’ennuie… Néanmoins, cette saison, même décevante, est bien supérieure à la plupart des séries. Et surtout! : les deux derniers épisodes, ceux où tout explose, se recentrant in fine sur le noyau dur de l’agence de pub, donne espoir pour la suite qu’on retourne dans le cocon vénéneux de la saison 1… La dream team de l’agence est reconstituée, l’instinct de survie de Don Drapper prenant le dessus, on est prêts pour la saison 4…
Diffusion sur Canal+ tous les jeudis soirs à 22h15 partir du jeudi 9 septembre 2010 (un seul épisode par jeudi!)
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